La couverture des tueries par les médias
Un extrait d'un article de Roger Ebert, qui reprend un de ses propres articles datant de 2003 pour montrer que rien n'a changé...
Laissez-moi vous raconter une histoire. Le lendemain du massacre de Columbine, j'ai été interviewé pour le journal d'information de Tom Brokaw. On avait donné une théorie à la journaliste et elle cherchait des arguments pour l'étayer. "Ne diriez-vous pas que ces tueries sont influencées par les films violents ? " me demanda-t-elle. "Non, je ne dirais pas ça". "Mais que pensez-vous du film "Basketball Diaries"? N'y montre-t-on pas une scène où un garçon pénètre dans une école armé d'une mitrailleuse ?". Ce film de 1995 avec Léonardo di Caprio contient en effet une courte scène de cette nature, dis-je, mais le film a été un échec commercial et il est peu probable que le tueur l'ait vu.
La journaliste eut l'air déçu, je lui détaillais donc ma théorie. "De tels évènements, dis-je, s'ils sont influencés par quelque chose, alors ils sont influencés par des programmes d'informations comme le vôtre. Quand un gamin déséquilibré entre dans une école et commence à tirer, cela devient un évènement majeur. Les chaînes du câble coupent leurs programmes habituels et passent les images en boucle. On attribue à l'évènement un logo et une musique… Le message aux autres enfants déséquilibrés du pays est clair : si je mitraille mon école, je deviendrai célèbre. La télé ne parlera que de moi. Les experts chercheront à quoi je pensais. Les autres gamins de l'école et les profs sauront qu'ils auraient dû me laisser tranquille. Ce sera mon moment de gloire."
"En bref, dis-je, des évènenement comme Columbine sont moins influencés par les films violents que par CNN, les NBC Nightly News et les autres nouveaux médias qui glorifient ces tueries au prétexte de les "expliquer". Je félicite le Sun-Times, dont l'éditeur a dit que le journal ne présenterait plus les tueries dans les écoles en première page".
La journaliste me remercia et éteignit la caméra.
Bien sûr, l'interview ne fût jamais utilisée. Ils trouvèrent de nombreux interlocuteurs pour condamner les films violents et tout le monde fût heureux.